L’ACTE INCONNU


© Christophe Péan
France / Haïti Théâtre

Création

« À nous qui devenons muets à force de communiquer, le théâtre vient rappeler que parler est un drame ; à nous qui perdons la joie de notre langue, le théâtre vient rappeler que la pensée est en chair ; à nous, pris dans le rêve de l’histoire mécanique, il vient rappeler que la mémoire respire et que le temps renaît. »
(Valère Novarina, Pendant la matière, P.O.L, 1991)

L’Acte inconnu est une pièce pour les acteurs qui savent devenir muet et laisser le langage les traverser, les transpercer. Novarina déploie son univers dans une exubérance de la parole, dans la matière sonore des mots –– et parfois des néologismes, des accidentés du lexique, des survivants du dialecte.
Il ouvre des espaces où s’entrechoquent les surprises, les interrogations : une déferlante de sensations qui vont plus vite que les mots. Il déconstruit et construit le langage –– et c’est toute notre humanité, qui soudain se déployer autrement devant nous.

Ce spectacle, mis en scène avec Céline Schaeffer, est né d’une première rencontre de Valère Novarina avec Guy Régis Junior qui l’avait invité à venir à Port-au-Prince travailler avec sa compagnie, le « NOUS Théâtre » il y a deux ans. Six acteurs : Edouard Baptiste, Valès Bedford, Jenny Cadet, France Medeley Guillou, Jean-Marc Mondésir, Ruth Jean-Charles et un musicien Finder Dorisca, des acteurs qui « savent d’instinct que parler est un geste, que la pensée va d’un trait ».

Entretien avec Valère Novarina, le 26 juin 2015

Marie-Agnès Sevestre : Vous avez créé L’Acte inconnu au Festival d’Avignon dans la Cour d’honneur, en 2007. Pour cette nouvelle création en Haïti, avec le même texte, avez-vous refait, refondu, repensé, le texte original ?
Valère Novarina : Après ma première expérience à Port-au-Prince en 2013, j’avais très envie de retrouver les acteurs d’Haïti, retravailler avec eux. Lors de ce séjour, invité par Guy Régis Junior, j’avais apporté deux textes. Ce sont les acteurs qui ont choisi L’Acte inconnu. Pour Limoges, je crée une réduction pour six acteurs. Il y a des choses qui disparaissent totalement (on passe de dix à six acteurs…). J’ai repris ce que nous avions travaillé avec Guy Régis Junior à Port-au-Prince et j’ai un peu augmenté toute la fin. C’est une petite équipe de « combat » qui s’est mobilisée, pour ce travail extrêmement audacieux car on a deux semaines en Haïti, une semaine à Limoges.

Il va falloir trouver une énergie incroyable à l’intérieur du texte, qui est lui-même un gisement d’énergie…
Oui, c’est un pari ! Mais ce sont des acteurs extraordinaires. Je n’avais jamais eu de première lecture aussi forte et vivante et appuyée sur les fondements vivants du texte.

Vous travaillez toujours avec un élément musical : sera-t-il influencé par Haïti ?
Nous aurons de nouveau un accordéon, qui est un instrument très souple, qui peut se promener sur le plateau. C’est un instrument qui a du souffle aussi, comme un acteur. Guy Régis a cherché un accordéoniste qui refera une musique avec les acteurs. Lors de cette lecture en Haïti, tous chantaient, refaisaient des chansons à leur façon. Il y a un don musical chez ces acteurs !
Ce qui m’a fasciné aussi, c’est l’idée que les acteurs dessinent, peignent de l’homme, peignent quelque chose dans l’espace. En Haïti, parmi les acteurs, deux étaient peintres. Il y a une extraordinaire effervescence de la peinture dans ce pays, d’une grande intensité, perceptible immédiatement.

Pour la scénographie, vous travaillerez aussi en collaboration avec eux ?
Nous n’avons pas un rond ! Il n’est pas question de construire une nouvelle scénographie… C’est un spectacle de fortune… Avec Céline et Richard, on réfléchit pour voir ce qu’on va utiliser de ce qui se trouve dans nos matériaux pour créer un espace. S’il y a des peintures, elles se feront sur place à Limoges. Les costumes se feront en Haïti et le décor plutôt à Limoges. En quinze jours, c’est un pari curieux…
Ces jours-ci, avec Céline et Richard, nous terminons la distribution du texte. Les acteurs vont apprendre leur rôle et nous allons être surpris nous-mêmes de la façon dont ça va se passer.

Comment voyez-vous la place de Guy Régis Junior ?
Guy Régis va beaucoup s’occuper de la musique. Je lui ai proposé un moment de faire la mise en scène avec moi, mais non, il ne voulait pas de cette place-là… On va inventer tout cela sur place.

Entretien avec Guy Régis Junior, le 2 juillet

Marie-Agnès Sevestre : Lors de l’atelier de 2013 avec Valère, comment s’est orienté votre choix vers L’Acte inconnu ?
Guy Régis Junior : Valère Novarina était inscrit dans notre programme d’étude d’ auteurs contemporains à l’Ecole nationale des arts de Port-au-Prince. Ce sont des cours que je dispense depuis mon arrivée en tant que directeur de la section théâtre, où je fais découvrir Heiner Muller, Koltès, Lagarce... Il était évident qu’un auteur comme Valère avait grandement sa place dans cette liste. C’est un prince du langage. Et notre littérature créole est bénie par des écrivains de cet acabit. Je l’ai donc invité à venir croiser Franketienne qui l’avait déjà lu. Et à rencontrer des étudiants, des comédiens pour qu’ils travaillent avec lui sur un de ses joyaux. Ce fut "L’Acte inconnu".

Il y aura finalement très peu de temps de travail, et très peu de moyens, quelles conséquences pensez-vous que cela aura sur votre façon de travailler ?
Je ne crois pas que le théâtre ait besoin de luxe pour être. Il a juste besoin d’humains. Ici, nous avons la chance de croiser un grand auteur. Pour moi, le Molière vivant. Et c’est nous qui sommes venus vers lui. Car le besoin se faisait sentir. Je crois dans un théâtre by any means necessary... Les projets marchent parce qu’on y croie, et non à coup de moyens exorbitants.

Quelle sera votre part de création dans ce spectacle ?
Ma place y est très humble. J’ai voulu créer cette rencontre en réunissant les comédiens autour de Valère qui m’a dit un grand Oui approbateur dès qu’il s’agissait de venir à Port-au-Prince.

Comment voyez-vous l’impact de ce spectacle à Port-au-Prince ?
On le verra dans le cadre du festival des Quatre Chemins en novembre. On laisse d’abord la chance à Limoges, lieu de la première sortie du spectacle. Le festival des Francophonies ainsi que la nouvelle direction du CDN ont très vite cru dans cette création qu’on espère gaie et flamboyante, comme la langue de Valère.

Les dates

Théâtre de l’Union
LIMOGES

30.L’ACTE INCONNU

Durée : Durée 1h45
Théâtre de l’Union
LIMOGES

30.L’ACTE INCONNU

Durée : Durée 1h45

L’ACTE INCONNU

Durée : Durée 1h45

Distribution

Texte Valère Novarina [éditions P.O.L juillet 2007]
Mise en scène Valère Novarina et Céline Schaeffer
Coordination artistique Guy Régis Jr.
Peintures : Edouard Baptiste, Valès Bedford et Valère Novarina
Interprètes :
Edouard Baptiste
Valès Bedford
Jenny Cadet
Clorette Jacinthe
Jean-Marc Mondésir
Ruth Jean-Charles
Finder Dorisca

Scénographie Céline Schaeffer, Richard Pierre et Valère Novarina
Lumière Claude Fontaine
Régie Générale Richard Pierre

Production

La rencontre avec Valère Novarina est organisée avec le soutien de la Sofia.

Le Théâtre de l’Union et le festival Les Francophonies en Limousin s’associent pour la production de L’Acte inconnu

Production déléguée NOUS Théâtre, Hélène Lacroix
Coproduction Théâtre de l’Union/CDN du Limousin, festival Les Francophonies en Limousin, NOUS Théâtre
Avec l’aide de l’Institut Français de Paris, l’Institut Français d’Haïti, la FOKAL, l’École Nationale des Arts d’Haïti, la SACD, la SPEDIDAM.

Diffusion/Production L’Union des contraires Séverine Péan/Platô
(L’Union des contraires est soutenue par le Ministère de la Culture et de la communication.
L’Acte inconnu est paru aux éditions P.O.L en juillet 2007.

Actualités

L’Acte Inconnu sera repris à La Maison des métallos à Paris pour 9 dates du 18 au 28 Mai 2016 (avec relâche les 22 et 23 Mai). Un petit changement dans la distribution, Clorette Jacinthe sera remplacée par Anyès Noel.