Théâtre de l’Union
Mardi 2/10 à 20h30
« Donc, je te parle comme à un être humain, parce que tu peux l’être si tu essaies de faire un petit effort. Si tu essaies vraiment. C’est pas si difficile que ça au final. C’est question de vouloir, arriver à taire ses caprices, empêcher ses démangeaisons épidermiques de s’exprimer. Tout ce qui est enfantin, quoi. »
Grigny, une famille issue de l’immigration, des HLM gris, la France de la fin des Trente Glorieuses, à une époque où Dieu ne pesait pas lourd.
Anton part pour les États-Unis, le pays de tous les départs...
La suite : 23 ans de réclusion, enfermé tour à tour par la CIA, le FBI, les services secrets français, otage dans le désert aux mains de groupes islamistes... Jouet de son époque, Anton ne sait rien, ne comprend rien, alors il parle, il s’invente, il s’excite, s’abime en disant le monde tel qu’il va et surtout tel qu’il ne va pas. Les mots de la folie deviennent peut-être alors ceux de la lucidité.
Quel parcours a conduit cet homme à cet endroit précis, aujourd’hui, isolé du monde ? Quelles vies, quelles rencontres, quels carrefours, quelles folies pour arriver à ces mots vociférés et à ce corps contraint ? Les cibles de sa colère se déplacent à mesure qu’Anton creuse les recoins de sa mémoire ou de sa folie ; ses geôliers, l’impérialisme, Dieu… Il règle ses comptes avec l’époque, avec les autres, avec lui-même. Ne pas s’épargner, ne faire l’économie de rien, tout dire jusqu’à l’épuisement, voilà son credo ! Pour tous ceux qui n’ont pas entendu quand il parlait doucement et ceux qui ont nié son existence, il parle plus fort, il hurle et il provoque pour qu’on l’écoute enfin.
Lorsque Frédéric Fisbach a demandé à Dieudonné Niangouna d’écrire pour lui, ils sont tous les deux en colère, très en colère de la bêtise qui triomphe, du sentiment d’impuissance à agir ou de l’incapacité d’envisager une alternative crédible aux apories de nos sociétés contemporaines. Le monde allait dans le mur, déjà ? Encore, toujours ? Ils ont bu, râlé, insulté la terre entière, tout le monde en a eu pour son compte, à commencer par eux-mêmes. Quelques mois plus tard Dieudonné Niangouna offrait Et Dieu ne pesait pas lourd... à son compagnon de théâtre. À la fois metteur en scène et comédien, Frédéric Fisbach s’empare de ce texte et porte cette parole épique, baroque et drôle avec jubilation. Un théâtre à la vitalité urticante, déconnante et nécessaire.